« Hier, on a clôturé un dossier pour une famille sans solution d’hébergement. Hier, j’ai clôturé l’accompagnement d’une famille, à la rue, avec un bébé de 4 mois.
Parce qu’on a fait toutes les orientations qui nous semblaient possibles.
Parce qu’on ne voit pas ce qu’on pourrait faire de plus, dans ce « contexte d’hébergement saturé ».
Parce que la famille a un accompagnement social, une fiche SIAO à jour, des orientations pour des aides matérielles, un suivi médical adapté pour la mère et l’enfant, des démarches administratives en cours, qui ont leur propre temporalité…
Mais se dire que le maximum qu’on puisse faire laissera quand même deux parents et un bébé dormir dehors, c’est dur. C’est dur et c’est inacceptable.
Parce que je me demande : comment on grandit quand c’est dans la rue qu’on apprend à regarder le monde, à se tenir assis, et à marcher ?
Qu’est-ce qu’on voit, qu’est-ce qu’on comprend, qu’est-ce qu’on ressent, quand on rentre de l’école pour dormir dans une voiture, sous un porche ou dans une cage d’escalier ?
Alors, même si on se dit qu’on a fait le maximum, je me demande : que deviendront ces enfants ? »
Esther, sage-femme coordinatrice du réseau SOLIPAM.
